Serie A : Honneur aux opportunistes
Analyse d’une Serie A paradoxale à l’heure où une nouvelle saison européenne se profile. Partagées entre promesses et manque de souffle, les écuries italiennes tenteront de retrouver le lustre d’antan…
Tant d’années de labeur…
2010. Dernière année en date à avoir connu le sacre d’une équipe italienne en finale de la C1. Certains diront que ce n’est pas si loin que cela, quatre ans. Si par ailleurs on observe les parcours des dites équipes italiennes avant et après cette fameuse date de 2010, on réalise soudainement qu’un drôle de syndrome s’abat sur la Serie A et ses courtisans européens. Alors que la Juventus de Turin règne sans partage depuis trois années consécutives sur le championnat local, les formations historiquement victorieuses sur le continent européen que sont l’AC Milan, l’Inter Milan, ou bien cette-même Juventus sont irrémédiablement à la peine dans la plus prestigieuse des joutes européennes.
Décevantes face aux équipes les plus modestes, parfois capables de se sublimer face aux autres cadors de la compétition… Mais le résultat ne change pas pour autant. Alors que la Juventus se voyait reversée en Europa League, impuissante, dans un groupe relevé opposant les bianconeri aux merengues du Real Madrid et aux valeureux turcs du Galatasaray notamment. Europa League, compétition dans laquelle la vieille dame ne brillera pas davantage, à l’instar du Napoli.
Le Napoli de Benitez, tout aussi attendu, était quant à lui renvoyé à ses études par le Borussia Dortmund et Arsenal, plus expérimentés. Car à ce niveau-là, la chance fait corps avec l’expérience. Que dire par ailleurs du grand Milan, qui n’inspire plus que l’intransigeance et n’a su conjuguer régularité qu’avec déception. Pire encore, l’Inter de Milan, lui n’était pas convié à la fête. Du tout.
Contexte et décisions
Si le football italien semble avoir posé un genou à terre depuis trois bonnes saisons, il serait pourtant maladroit de ne pas considérer tous les aspects d’une telle perte de vitesse. Une fois les considérations expertes en économie mondiale laissées de côté, la leçon que tous retenons est la difficulté économique globale actuelle. Le microcosme footballistique, à son échelle, est également frappé par cette crise économique , favorisant comme dans tous les domaines l’apparition de disparités importantes. La provenance des fonds et la législation de certains pays favorisant parfois la prospérité des écuries (Real Madrid, PSG, Monaco, Chelsea, Barcelone…)
Toutefois, il semblerait pour en revenir à l’Italie que ce contexte économique pointu ait accéléré et exacerbé les erreurs de gestion, même parmi les institutions historiques du Calcio. Blâmer uniquement l’aspect financier, bien que cela reste une possibilité fondée, ne servirait qu’à faire emphase au manque cruel de réalisme dont le Milan AC, la Juventus et plus récemment l’Inter ont fait preuve. Alors que les équipes de Serie A connaissaient des parcours exemplaires en Ligue des Champions entre la moitié des années 2000 et le fameux an 2010, l’échange de cadres entre pensionnaires du championnat italien et les départs nombreux et successifs des plus grandes stars contribuait à affaiblir d’autant plus certains des plus beaux effectifs de l’histoire.
Si les dirigeants et entraineurs ne peuvent pas nécessairement être blâmés en cas de départs, il est impératif de constater qu’eux seuls peuvent garantir la sécurité d’une équipe compétitive notamment quant à la question des renforts. Et en Serie A, le gâchis a parfois atteint des sommets. Pour que ne vous en remettiez pas qu’à notre bonne foi, citons par exemple les 65M€ obtenus par le Milan AC pour la vente de Kàkà, et reversés dans des opérations par définition infortunées au regard du standing et du palmarès de cette formation et des résultats obtenus depuis. De même que les sommes investies par la Juventus pour redorer son blason sur la scène européennes n’auront jusque là pas porter leurs fruits
Le véritable tournant pour le championnat italien ?
Le recrutement, le flair, et les capacités de négociations, voilà bien trois caractéristiques qui semblent définir une génération nouvelle en Serie A. Nouvelle génération qui ne rime pas nécessairement avec nouveaux noms, puisque si le Salut devait se profiler à l’horizon pour le football italien, il se pourrait bien qu’il vienne du Sud, et plus particulièrement de Rome et de Naples. Les deux formations transalpines affichent deux effectifs bien garnis, un savant mélange de jeunesse prometteuse et d’expérience tenace, à l’image des Totti, De Rossi, Pjanic, Benatia (bien parti pour rester), ou encore Seydou Keita le nouvel arrivant coté romain, ou bien les Hamsik, Higuain, Mertens, Maggio et compagnie coté napolitain.
L’AS Roma qui s’appuiera autant sur son ossature, solide second l’an dernier derrière les champions de la Juventus, que sur ses nouvelles promesses. Juan Manuel Iturbe, l’argentin recruté pour un peu moins de 30M€, et Salih Ucan le jeune turc, qui devraient disposer d’un temps de jeu raisonnable étant donné que pour la première fois depuis 2010/2011, le club de La Louve disputera la Ligue des Champions et sera donc engagé dans les trois compétitions principales, à savoir outre l’Europe : la Coppa Italia et la Serie A.
Tout comme le Napoli d’ailleurs, qui ne manquerait pour rien au monde son rendez-vous en C1. La formation originaire de Campanie espère toujours attirer Marouane Fellaini, qui ne semble pas intéresser son entraîneur Louis Van-Gaal à Manchester United si tant est que le problème soit d’ordre sportif. En bref, une présence qui ne s’explique pas seulement par deux effectifs à faire pâlir tout le reste de la Serie A. Il convient de rendre à Benitez et Garcia ce qui est à Benitez et à Garcia. Autrement dit, une belle capacité de focalisation et un travail bien fait, qui s’annonce bien fait pendant quelque temps encore. L’avenir pourrait être radieux pour ces deux formations si la continuité et le sérieux sont au rendez-vous. La destination, nous l’avons constaté, ne dérange visiblement pas les footballeurs les plus prometteurs.
Un avenir radieux pour certains, en demi teinte pour d’autres….
Si le Napoli et la Roma seront davantage des prétendants au spectacle et au beau jeu qu’à la victoire finale en Ligue des Champions, il convient de leur souhaiter bonne chance avec réalisme. Ce qui n’est pas à coup sûr le cas concernant les deux légendes italiennes que sont le Milan AC et la Juventus de Turin. Le premier nommé semble vouloir se stabiliser, avec un effectif aux talents limités mais non moins certains, qui pourrait effectuer un parcours convenable sous les ordres de son nouveau coach, la légende du club et ancien renard des surfaces Filippo Inzaghi. On imagine presque un parcours correct, mais on ne voit pas ce Milan briller. Pas immédiatement, en tout cas.
Et puis, tant qu’à faire, ne serions nous pas en train de sous-estimer la Juventus ? Peut-être. Mais nous avons su la surestimer l’an passé, et les récents événements (départ d’Antonio Conte, entraîneur victorieux depuis 3 saisons et véritable instigateur de la dynamique turinoise, cliquez ici pour plus d’informations…) ainsi que l’intronisation de Massimiliano Allegri, plus que contesté après un passage mitigé au Milan AC, où il a su conjuguer victoires, chute, victoires, rechute et clap de fin, et qui malgré l’effectif alléchant dont il dispose ne semble pas pouvoir faire partie de ces entraîneurs « champagne » comme on aime en voir provenir d’Italie.
L’inter de Milan, quant à lui, effectue pour l’instant un mercato discret mais pas tant que ça. Intelligent, également, mais pas tant que cela une fois de plus. Un recrutement basé sur divers espoirs, parmi lesquels on peut citer Yann M’vila, ainsi que sur des valeurs sûres comme Osvaldo, loin d’être pour autant flamboyant ou Gary Medel. Il en faudra toutefois plus pour espérer truster les premières places et jouer les premiers rôles sur la scène européenne. La formation de Walter Mazzari fait néanmoins partie des prétendants aux billets européens.
Mais comme se plaisent à le préciser les supporters romains rencontrés aux détours de nos vacances estivales, bien que le tifoso ne soit pas doué d’une objectivité exemplaire, il appuie là ça où ça fait mal : « En Italie, vous pouvez appeler le Chievo Vérone, Parme, Palerme, la Sampdoria ou le Torino des petites équipes, mais c’est à vos risques et périls. Ici, les soi-disant petits ne se laissent pas autant faire qu’ailleurs… »
Il convient effectivement d’être prudent lorsque l’on utilise ce terme à propos du Calcio. La Lazio de Rome, est-ce une petite équipe ? Rien n’est moins sûr. Ce ne sont pas l’Udinese, Di Natale et ses quintaux de buts qui vous diront l’inverse… Le championnat italien s’annonce une nouvelle fois disputé, mais il semblerait, comme l’indique le titre de cet article, que si certains des gagnants occasionnels que peuvent être la Roma ou le Napoli souhaitent en profiter, le moment soit bien choisi…